Eldorado – Laurent Gaudé (2006)

Eldorado – Laurent Gaudé (2006)

Salvatore Piracci est l’un des gardiens d’une forteresse imprenable. Cette forteresse bien gardée, entouré de rochers traîtres et coupants, d’une mer et d’un océan, on l’appelle l’Europe. Chaque jour, des centaines de migrants la prennent d’assaut dans l’espoir de s’y infiltrer et de mener une vie meilleure.

Toutes les nuits, le commandant Salvatore Piracci arrête des navires clandestins. Chaque navire qu’il intercepte est un retour à la case départ pour les passagers migrants. Et ce ne sont pas les plus malchanceux, car nombreux sont les naufragés perdus en mer, les victimes de traquenards et d’arnaques, pour qui l’audace et l’espoir leur coûteront la vie. En d’autres termes, il les sauve d’une mort lente sur les eaux de la Méditerranée.

Le seul fait d’être né du bon côté de la mer lui donne ce statut privilégié, cette vie ou la faim et le besoin n’existe pas, ou le vin coule en abondance et les anancini, poivrons farcis et poissons frais marque le quotidien du sicilien. Mais un jour, il se retrouve face à une migrante qui a tout perdu. Et là, sa foi en sa mission flanche et sa vie bascule.

Souleiman et son frère sont décidés. Ils passeront la frontière coûte que coûte. Ils ont réuni assez d’argent pour organiser le passage et fait leurs adieux à leur terre natale, le Soudan. Ils se retrouvent forcés de renoncer à leurs amis, leur maison, leur nom et leur réputation pour recommencer à zéro. Passer de quelqu’un à personne, pour le reste de leur vie. D’un citoyen à un étranger. Dans l’espoir d’un jour atteindre l’Eldorado : le continent européen.

Dans ce magnifique roman, Laurent Gaudé parle de l’immigration d’une manière non pas chiffrée comme on le voit dans les nouvelles internationales, mais comme on devrait toujours en parler : d’une manière humaine.

L’écriture est belle et imagée, on ressent les douleurs et les tourments des personnages qui se battent autant d’un côté de la mer comme de l’autre, pour faire face aux injustices arbitraires et géographiques dont l’homme est victime. Jamais encore je n’avais lu un livre qui m’avait donné une telle perspective sur le point de vue d’un migrant prêt à tout pour passer la frontière, dans l’espoir d’offrir un avenir meilleur à sa famille et ses proches.

Avant les frontières, avant les locaux, avant les migrants, il y a l’homme. L’homme qui, où qu’il soit, sera prêt à tout pour son bonheur et celui de son prochain.

Je vous le recommande vivement.


Éditions Acte Sud
243 pages