La Fabrique d’Absolu – Karel Čapek (1922)

La Fabrique d’Absolu – Karel Čapek (1922)

Saviez-vous que lorsque l’on brûle un morceau de charbon pour générer de l’énergie, on n’utilise qu’une fraction de ce morceau ? Et que chauffer une ville comme Prague durant une forte nuit d’hiver pourrait seulement demander un copeau de la taille d’une noisette, si utilisé pleinement ?

Au début du siècle, à Prague, un inventeur de génie cherche à se débarrasser d’une invention dont le pouvoir le dépasse. Le Carburateur, ou la Fabrique d’Absolu, permet de générer une quantité inouïe d’énergie à partir de n’importe quel matériau. Donnez-lui un morceau de bois ou une chaussure, peu importe : la machine désintègre l’objet au niveau atomique, libérant une quantité d’énergie incroyable. Fini le froid, fini les nuits d’hiver, le manque de charbon et de carburant. La question de l’énergie semble bel et bien être résolue, pour toujours.

Mais comme dans toute bonne histoire, un cadeau vient toujours avec son poison. À chaque fois qu’une matière est désintégrée, elle libère une sorte d’essence immatériel qui euphorise, pousse à la bonté, l’extase et la frénésie religieuse : l’Absolu. Le panthéiste avance que Dieu se manifeste dans tout ce qui existe, que ce soit l’homme, les pierres ou les arbres. Spinoza développe cette idée en disant que la matière n’est qu’un aspect de la substance divine, et que l’autre aspect est l’âme. Fechner dit que tout, absolument tout, a une âme. Finalement, Leibniz assure que la matière est composée de substances divines, qui forment tout.

Et nous y sommes. L’homme a inventé une machine capable de décomposer l’œuvre de Dieu, et de dégager une énergie folle en même temps que la substance divine. Mais comme vous pouvez l’imaginer, la fête va vite tourner au désastre.

Un roman qui pose des questions sur la religion, sur l’industrie moderne, la question énergétique, sur les mœurs et la bêtise de l’homme. Un grand roman, je n’avais jamais rien lu de pareil. Et je le conseille à tout le monde, car comme si peu de roman, Čapek arrive à être aussi intelligent et grave que diablement drôle.


Éditions LaBaconnière
289 pages